La nouvelle Assemblée nationale a voté la loi d’habilitation nécessaire au gouvernement pour légiférer par ordonnance sur la réforme du Code du travail au cours de l’été. Depuis, les services du ministère du Travail élaborent ces ordonnances. Ce qui transparaît aujourd’hui du contenu de ces ordonnances c’est, comme l’écrit le journal patronal « Les Échos » du 22 août, que « le patronat pourrait voir aboutir certaines revendications de longue date ».
Alors que le gouvernement :
- Confirme l’augmentation de la CSG pour les retraités et annonce la baisse de 5 euros des APL accentuant la précarité des plus pauvres ;
- Rétablit le jour de carence et gèle le point d’indice des fonctionnaires ;
- Annonce la suppression massive d’emplois dans la fonction publique ;
- Décide la suppression de 166 000 contrats aidés ;
- Poursuit l’assèchement des finances des collectivités territoriales en leur supprimant 300 millions d’euros de dotation ;
- Impose 100 millions d’euros d’économie supplémentaire aux hôpitaux ;
- Et après avoir appauvri les salariés, enrichit les financiers en exonérant les dividendes de certaines taxes, à hauteur de 3 milliards d’euros !
Qui peut croire que ces ordonnances ne porteront pas un coup brutal aux droits des salariés ?
D’ailleurs, ce qui filtre dans la presse est clair. Ces ordonnances consacreront :
- L’accentuation de la loi El Khomri en matière d’inversion de la hiérarchie des normes : la primauté des accords d’entreprise sur les accords de branches, limitée au temps de travail par la loi El Khomri, s’étendrait à de nombreux domaines. Les dérogations pourraient porter non seulement sur le temps de travail, mais aussi sur les salaires et les primes, les contrats de travail, les conditions de travail, avec le risque de « dumping social » que cela suppose…
- Le plafonnement des indemnités prud’homales dans le cas de licenciement abusif.
- La remise en cause du CDI par la banalisation du « CDI » de chantier, sorte de super CDD.
- La modification du périmètre retenu pour apprécier les « difficultés » d’une filiale d’un groupe international qui envisage de la fermer ou d’y licencier. Les ordonnances devraient limiter le périmètre d’analyse de la situation économique uniquement à la France et non pas sur l’ensemble du groupe. Un groupe international pourrait alors assécher artificiellement les finances de son établissement en France pour délocaliser.
- La fusion des instances représentatives des salariés : des délégués du personnel, des élus au CE, des membres du CHSCT, dans une instance unique avec pour conséquence une réduction très importante du nombre de délégués et des heures de délégation. Il est même question d’y intégrer les délégués syndicaux et donc la compétence de négociation. Ainsi, seule l’organisation syndicale majoritaire pourrait négocier, les autres se voyant interdire l’accès à la négociation.
- La possibilité de négocier avec des élus non syndiqués dans les entreprises de moins de 300 salariés. Les patrons revendiquent cela de longue date. En effet, ces élus, souvent choisis par le patron, sans le soutien et l’assistance d’une organisation syndicale, sans connaissance du droit du travail, négocieraient dans des conditions où la pression patronale serait maximale.
- Référendum d’initiative patronale : pour valider un accord minoritaire signé par des syndicats représentants plus de 30 % des salariés, les ordonnances, aggravant la loi El Khomri, permettront au gouvernement d’instaurer un référendum initié par l’employeur, alors que cette possibilité est, pour l’heure, réservée aux organisations syndicales.
- L’introduction du chèque syndical qui fait de l’employeur le financeur des organisations syndicales. Or « qui paie commande ! » Que resterait-il de l’indépendance syndicale ?
Cette semaine le gouvernement a poursuivi les « concertations » avec les interlocuteurs sociaux en commençant par le Medef. Mais lesdits interlocuteurs n’ont pas eu de document écrit ni le droit de prendre des notes (sic !). En matière de concertation, on pourrait s’attendre à mieux !
Au sortir de cette réunion, la délégation FO a déclaré qu’aucune des « lignes rouges » (inversion de la hiérarchie des normes, possibilité de négociation avec des élus non syndiqués, fusion des IRP…) n’était tranchée. Cette rencontre n’a en fait porté que sur des points annexes, l’essentiel n’étant pas, selon le gouvernement, « arbitré ». Tout laisse penser que ce dernier avance masqué et qu’il prépare une « Loi Travail XXL ».
Contre un droit du travail pulvérisé en autant d’accords d’entreprises, contre des conventions collectives réduites à la portion congrue, pour le maintien de la règle républicaine : « la loi doit être la même pour tous », le bureau de l’Union Départementale FO considère que l’heure est à la préparation de la mobilisation.
Le bureau de l’UD s’inscrit dans le droit fil du mandat de la Commission Administrative du 12 juin :
« La CA appelle à réunir les instances, les syndiqués, à tenir des réunions d’information syndicale pour informer les salariés, établir et réaffirmer les revendications, poursuivre les prises de positions, y compris dès que c’est possible dans l’action commune. »
La date du 12 septembre a été avancée par certains syndicats. Cette perspective reste, pour nous, ouverte. La décision finale de la forme de l’action sera prise par l’UD après la tenue de l’intersyndicale départementale convoquée le 31 août.
Angers, le 25/08/2017
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